Les deux parties précédentes
n'étaient que les toutes premières
étapes, indirectement liées à
la problématique. Nous entrons maintenant
dans le vif du sujet avec l'histoire de la création
de la bombe. A partir de maintenant, la moitié
de la problématique qui nous intéresse
dans cette partie "Histoire", c'est-à-dire
la politique, va être véritablement
traitée.
Les étapes de la
création de la bombe
- Le 2 août 1939, Albert Einstein informe
le président Roosevelt du risque dû
aux progrès accomplis en matière
de physique nucléaire et de leurs retombées
éventuelles sur les pays alliés,
avec sa célèbre lettre ! L’Allemagne
a en fait depuis longtemps abandonné
l’espoir de mettre au point la bombe
atomique, et les Etats-Unis bénéficient
de l’aide de nombreux physiciens exilés.
Roosevelt, prudent et inquiet envers l'avenir
de son pays et de ses compatriotes, encourage
le progrès dans le domaine de la physique
nucléaire et ordonne l’invention
puis la construction d'une arme de destruction
massive sans précédent. En 1942,
Enrico Fermi met au point la première
pile atomique, et ce progrès important
ravit le président américain.
- Il s’ensuit le fameux « projet
Manhattan », basé à Los
Alamos, dont le but est de mettre au point
la « bombe extrêmement puissante
d’un type nouveau » à laquelle
fait allusion Einstein dans la précédente
lettre. Ce projet est dirigé par le
général Leslie Groves et le
physicien Robert Oppenheimer. Il emploie plus
de 130000 personnes et coûte quelques
2 milliards de dollars( en 1945) au total,
soit plus de 20 milliards de dollars actuels.
Ce projet aboutit à 3 bombes, dont
la première, Gadget est testée
dans le désert du Nouveau-Mexique lors
du premier essai nucléaire de l'histoire
nommé pour l'occasion Trinity : c’est
la 1ère explosion atomique. Le nom
de code de l'essai nucléaire, venant
de celui de la divinité catholique,
n’a rien de divin et sera la cause de
milliers de morts et de psychose tout au long
de l’Histoire. Toujours est-il que les
témoins de l’explosion sont très
impressionnés par la puissance dévastatrice
de la bombe : le projet Manhattan est un franc
succès pour Roosevelt et ses subordonnés.
La construction « en série »
est mise en œuvre (on ne peut pas vraiment
la comparer à une simple voiture d’usine),
et donnera lieu durant des décennies
à des débats qui ne sont pas
terminés à l’heure actuelle
et provoquera de nouvelles guerres (cf. la
guerre en Irak du début du XXe siècle).

L'installation de la bombe
dans sa tour de largage
Voir
le site de l'explosion /::\
Voir
le site de l'explosion ( zoom )
Nous
vous proposons ci-dessous le bilan financier
du projet Manhattan :
Site ou projet |
Coût
à l'époque (dollars de 1945) |
Coût
en dollars de 1996 |
Oak Ridge (total)
- Usine K-25 (diffusion gazeuse)
- Usine Y-12 (séparation électromagnétique)
- Usine S-50 (diffusion thermique)
- Clinton Engineer Works'
gestion
- Clinton Laboratories
|
- 512'166'000
- 477'631'000
- 15'672'000
- 155'951'000
- 26'932'000
|
- 5'846'644'000
- 5'452'409'000
- 178'904'000
- 1'780'263'000
- 307'443'000
|
Handford Engineer Works |
390'124'000 |
4'453'470'000 |
Matériel spécial |
103'369'000 |
1'180'011'000 |
Los Alamos |
74'055'000 |
845'377'000 |
Recherches, expériences, développement |
69'681'000 |
795'445'000 |
Frais généraux, frais du
gouvernement |
37'255'000 |
425'285'000 |
Fabriques d'eau lourde |
26'768'000 |
305'571'000 |
TOTAL |
1'889'604'000 |
21'570'821'000 |
La lettre d'Albert
Einstein au président Roosevelt : quelques citations

La lettre fait état de
la possibilité de créer des bombes
d'une puissance encore inconnue, Einstein ne
sait pas encore si la bombe pourrait être
embarquée dans un avion :
« Ces quatre derniers mois,
il est devenu possible grâce aux travaux
de Joliot en France ainsi que ceux de Fermi
et Szilard en Amérique, de déclencher
une réaction en chaîne nucléaire
avec de grandes quantités d'uranium.
Grâce à elle, une grande quantité
d'énergie et de grandes quantités
de nouveaux éléments similaires
au radium pourraient être générés.
Maintenant, il semble presque certain que ceci
pourrait être atteint dans un très
proche futur. Ce nouveau phénomène
pourrait conduire à la construction de
bombes et il est concevable, quoique moins certain,
que des bombes d'un nouveau type et extrêmement
puissantes pourraient être assemblées.
Une seule bombe de ce type, transportée
par bâteau et explosant dans un port,
pourrait très bien détruire l'ensemble
du port ainsi qu'une partie de la zone aux alentours.
Toutefois, de telles bombes pourraient très
bien s'avérer trop lourdes pour un transport
aérien. »
Le texte laisse présager
que la Belgique sera un précieux allié
pour obtenir de grandes quantités d'uranium
:
« Les États-Unis
n'ont que de l'uranium pauvre et en quantité
modérée. Il y a de bons filons
au Canada, dans l'ancienne Tchécoslovaquie
mais les sources les plus importantes se trouvent
au Congo belge. »
Einstein demande l'appui de Roosevelt
:
« Eu égard à
ces éléments, vous pensez qu'il
serait désirable d'avoir un contact permanent
entre l'Administration et l'équipe de
physiciens qui travaillent sur les réactions
en chaîne en Amérique. »
Il fait part de ses craintes au
sujet de l'Allemagne qui semble s'intéresser
à l'uranium :
« Il paraît que l'Allemagne
a actuellement stoppé la vente d'uranium
des mines tchèques qu'elle a annexées.
Une telle action précoce de sa part peut
sans doute être mieux comprise quand on
sait que le fils du sous-secrétaire d'État
allemand, Von Weishlicker, est attaché
à l'Institut du Kaiser Wilheim à
Berlin où une partie du travail américain
sur l'uranium est en train d'être reproduit.
»
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